Défendons l'éducation prioritaire à Montreuil : nouveau communiqué de presse
Je viens de recevoir ce communiqué excellent.
Communiqué de presse, parente en lutte, collège Paul Eluard 20 janvier 2015
Nous, parents d'élèves du collège Paul Eluard et des écoles du secteur, avons un nouveau rendez-vous au rectorat, demain mercredi 21 janvier. Nous attendons beaucoup de ce rendez-vous. Notre engagement et notre mobilisation n'ont jamais été la lubie d'une poignée de privilégiés qui craignaient de perdre leurs avantages.
Depuis 2 mois maintenant, nous défendons le maintien de moyens minimaux pour faire fonctionner un collège et ses 6 écoles dans un contexte particulier, dans un département particulier. Nous réfutons depuis le début les chiffres, critères et analyses qui nous ont fait sortir du dispositif REP.
Or, les évènements terribles que nous venons de traverser n'ont fait que nous renforcer dans notre détermination à défendre notre réintégration dans le REP, ainsi que celle des 3 autres établissements du 93. Nous ne permettrons pas de voir voler en éclats le peu de choses que nous avons mis des années à construire.
Nous déclarons que la mixité sociale, culturelle et confessionnelle telle que nous la vivons dans notre quartier et dans le département de la Seine-Saint-Denis doit être encouragée et soutenue, et non stigmatisée en nous taxant de privilégiés.
Mixité confessionnelle : un lycée professionnel de confession juive (à 50 mètres de notre collège), de nombreux lieux de prières musulmans qui ont été ouverts ces2 dernières années, ainsi qu'une synagogue l'année passée.
Mixité sociale et culturelle : des gens qui dorment dans leur voiture et une ministre d’Etat (dont l’enfant ne fréquente pas les écoles du secteur), 2 MOUS Rom et des intermittents du spectacle, 25% de logements insalubres et les marchands de sommeil qui vont avec, 35.5 % de familles monoparentales (moyenne sur la ville: 32%), 35.5 % de ménages non-imposés (moyenne sur la ville : 37%), environ 25%d’enfants qui ne parlent pas le français à la maison, une trentaine d’enfants en UPE2A (classe d’intégration pour les primo-arrivants), des dizaines de sans-papiers, des squats de travailleurs pauvres et des squats d’artistes.
L'équilibre de cette mixité qui a fait dire aux décisionnaires que nous n'avions plus besoin des moyens de l'éducation prioritaire est fragile. Nous avons dit depuis le début de la mobilisation, et tout le monde en est convaincu après ces évènements tragiques, que nous retirer les moyens de l'éducation prioritaire est irresponsable et absurde.
Les conséquences concrètes de la sortie de l'éducation prioritaire sont :
- On propose ni plus ni moins aux enseignants qui le souhaitent une facilité de mobilité pour changer d'établissement et demander un collège classé REP ailleurs, ce qui signifie la destruction de la stabilité des équipes (86% des enseignants du collège ont plus de 2 ans d'ancienneté) alors que l’administration n'arrive pas à recruter et à stabiliser les enseignants en Seine-Saint-Denis. C'est toute la perversité de cette sortie de REP : non seulement on supprime des moyens mais en plus, on propose à ceux qui assuraient son bon fonctionnement de s'en aller.
-L'inspection académique a déjà annoncé il y a 2 semaines la suppression d'une classe à l'école élémentaire Voltaire, ce qui donne deux classes à 29 élèves et 2 double-niveaux! Les primo-arrivants en classe d'intégration (UPE2A) ne sont pas comptabilisés dans les effectifs. Quand ils rejoindront leur classe en cours d'année, les classes à 30 sont ici une réalité et non un fantasme comme on veut nous le faire croire.
- On demandera aux enseignants, faute de moyens, de choisir entre la classe bi-langue, le latin ou le grec d'une part et les cours en demi-niveaux, le soutien individualisé ou le renforcement en français et mathématiques d'autre part. D'un côté, on crée de l'évitement parce qu'il n'y a plus d'offre attractive, de l'autre, on met en péril tout le processus d'aide aux enfants en difficulté. Choix cornélien parce qu'il n'y a que des perdants.
-L'évitement scolaire est une réalité et ne fera qu'empirer. Il y a ceux qui n’ont jamais mis leurs enfants dans les écoles du secteur et qui échappent à toute comptabilité, ceux qui ne font pas leur entrée en 6ème et ceux qui partent en 4ème. Des parents ont déjà pris leurs dispositions pour scolariser ailleurs leurs enfants car la sortie de l'éducation prioritaire signifie pour eux la dégradation des conditions d'enseignement.
- Enfin, les heures du REP ont aussi permis un rapprochement et des échanges avec le lycée professionnel juif Daniel Mayer, ce qui a contribué à l'apaisement des relations entre les adolescents.
Lors des vœux de notre député Razzy Hammadi, nous avons pu rencontrer Claude Bartolone. Nous lui avons fait part de notre inquiétude et de notre colère quant à cette décision ministérielle. Nous lui avons remis une lettre afin qu'il puisse prendre connaissance du problème et nous lui avons clairement demandé son soutien. Monsieur Bartolone, ainsi que Monsieur Hammadi nous ont assuré de leur compréhension quant à la situation. Nous leur demandons qu'ils s’engagent concrètement car ils nous ont dit partager notre inquiétude sur les conséquences de cette sortie du REP et sur l'indispensable attention dont l’école doit bénéficier.
Car depuis la vague d'attentats, les déclarations politiques s'enchainent et encore une fois l'école est au cœur du débat. Nos enfants croisent tous les jours les militaires en armes chargés de la protection du lycée juif et de la synagogue. D’un coup, nous sommes devenus un quartier "sensible". Or, depuis, le20 novembre, début de notre mobilisation, nous crions partout à qui veut l’entendre que nous sommes effectivement un quartier "sensible" et que toute la Seine-Saint-Denis l'est. L'armée sera-t-elle la seule réponse?
Nous appelons les politiques à prendre leurs responsabilités et à agir. Mixité, vivre-ensemble sont autant de mots qui sont prononcés comme des incantations par nos hommes et nos femmes politiques. La suppression du réseau d'éducation prioritaire ici, dans les 3 autres établissements du 93, dans le collège Lucie Faure en plein 20ème arrondissement, à Clichy-la-Garenne et dans beaucoup d’autres endroits de France c'est détruire l'espoir d'y arriver, car effectivement, l'école est au cœur de tout.
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